Jean-Claude Michaux - 14.85 x 21 cm - 50 pages
Jean-Claude Michaux propose « Alphabêtes », des poèmes consacrés aux animaux. C’est succulent !
Ancien enseignant, comédien, et surtout heureux retraité lettré sensible et fraternel.
Jean-Claude Michaux avait publié, il y a peu, un premier court recueil de brefs poèmes, Courir le coquillage, prometteur, frais et audacieux. Le voilà qui récidive avec autant de bonheur en nous donnant à lire Alphabêtes, une vingtaine de poèmes où il décrit et «portraitise» avec une pétillante subjectivité nos amis les animaux. Dans le bestiaire de Jean-Claude Michaux – l’arche de Liomer, comme d’autres bretteurs, moins pacifistes, créèrent la botte de Nevers – : l’araignée, le boa, le caïman, le chat, le chien, l’escargot, la
fourmi, le gnou, la grenouille, le hibou, le coucou, le kangourou, le koala, le loup, le moustique, l’ours, les oies, le poisson rouge, la poule, les poux, les puces, la souris, la vache, le taureau le yack-zébu. Ne cherchez pas là d’absconses et rêches recherches qui vont à la pêche à la nouveauté comme d’autres vous cherchent des poux dans la tête. Michaux a l’élégance de faire simple, juste et bon; jamais il n’assomme, jamais il ne prend de haut, jamais il ne professe ou intellectualise. Ce garçon-là a le verbe gai ; l’intelligence à portée de verres. On est chez Prévert, chez Cendrars, chez Desnos. Pas chez les professeurs du «isme» qui se poussent du col dans les chapelles austères des savantes universités. Jean-Claude Michaux appelle un chat un chat, un gnou un gnou, fut-il bi comme soixante-neuf cornemuses bretonnes. On s’amuse souvent ; on rit beaucoup. On savoure ces mots légers comme des bulles, comme les gaz tourbeux de tanches romantiques.
Il n’oublie pas l’émotion. Exemple quand il confie à propos du chat : « Il cultiva la paresse rêveuse et le ronron quelque peu distant. L’an dernier, un peu avant Pâques, il s’allongea pour la sieste sur un massif de fleurs et ne réveilla pas. » Rires encore, du boa : « Il m’invite parfois à partager cette rencontre, à entrer en contact comme il dit. Jamais, j’ai bien trop peur ! Avec les serpents je manque de sang-froid. » Ou à propos du caïman: « Comme s’ils pressentaient aussi leur destin : finir sac au bras d’une vieille élégante ! ». Et au sujet du taureau: «Dans une arène/ Madrilène/ Les cris font relâche/ Qui oserait sombre bravache/ Souhaiter encore/ La mort aux vaches. » Réveillez la bête qui est en vous ; lisez Jean-Claude Michaux !
- Philippe Lacoche -